D’un Saint-Pierre à l’autre
Saint-Pierre
de Montmartre
La légende situe le martyre de saint Denis sur le
Mont de Mercure, devenu Mont des Martyrs et lieu
de pèlerinage ; les fouilles ont révélé une importante
nécropole mérovingienne accolée à une église. Du
XIIe siècle à la Révolution, l’abbaye royale de Montmartre,
de grand renom, couronne la butte ; Ignace de Loyola et ses
compagnons y fondent la Compagnie de Jésus (1534). À la
Révolution, l’abbaye est profanée, pillée et détruite ; ne subsiste
que l’église Saint-Denis-Saint-Pierre car elle desservait
la paroisse ; seul le second vocable est finalement conservé.
En 1806, Saint-Pierre est rendu au culte, sauf l’abside qui
servait alors de base au télégraphe Chappe. En 1814, les
russes installent dans la nef leur magasin à vivres. Puis des
travaux sont entrepris qui mutilent le bâtiment. En 1850,
selon Prosper Mérimée, « La situation de l’église est déplorable.
» Elle est sur le point de tomber en morceaux. La
démolition est envisagée. Pendant la Commune magasin
de munitions, subissant ensuite des travaux fantaisistes,
sa survie mise en jeu par l’élévation de la Basilique du Sacré-
Coeur sur la parcelle voisine à la suite du voeu national,
l’église Saint-Pierre est sauvée en 1897 grâce à Georges Clemenceau,
maire de Montmartre. Le culte est rétabli en 1908
dans une église restaurée.
La façade est refaite au XVIIe siècle, les portes de bronze, don
et oeuvre du sculpteur Tommaso Gismondi en 1980, honorent
les titulaires successifs de l’église : Saint-Denis, Saint-Pierre
et Notre-Dame. La nef garde ses murs du XIIe siècle, la voûte
d’arête sur croisée d’ogive date de 1470, la première travée
du choeur est romane, l’abside gothique. Max Ingrand réalise
les vitraux (1952) illustrant la vie du Christ et de saint Pierre,
et J.-P. Froidevevaux l’autel en cuivre émaillé (1977) sur lequel
se profile la Butte. Surtout, entrer dans cette église vous
transporte loin de Montmartre, hors du temps.
Sabine Garnier