Ouverture :

D’un Saint-Pierre à l’autre
Saint-Pierre de Montrouge

Entre le mur des Fermiers généraux, dont il reste l’octroi de la barrière d’Enfer, et les fortifications de Thiers, s’étendait un hameau dépendant du village de Montrouge. En 1860, le Petit-Montrouge devient une partie du XIVe arrondissement de Paris. Émile Vaudremer (1829-1914), passé par la Villa Médicis (2e Grand Prix de Rome), y construit la prison de la Santé (1867) selon les modèles américains et l’église Saint-Pierre de Montrouge (1863- 1872) selon les critères rationalistes à l’école de Violletle- Duc ; il construira aussi en 1890 la cathédrale orthodoxe grecque Saint-Étienne, rue Georges-Bizet. L’emplacement alloué à l’église, au carrefour d’Alésia, manifeste le rôle qu’on lui donne de structurer l’espace citadin.
L’architecture doit clairement montrer, par le choix des matériaux et l’ensemble de ses lignes, la fonction du bâtiment ; ainsi de l’extérieur peut-on lire le plan de l’église, traité dans un style néo-roman, grâce à une toiture spécifique pour chaque volume : nef, choeur, déambulatoire, chapelles latérales formant transept. À l’intérieur se mêlent des influences paléochrétiennes et byzantines : arcs surbaissés soulignés au pochoir, figures géométriques, pavement du sol en mosaïque ; la charpente apparente est peinte de couleurs vives.
Le choeur est remarquable : l’autel, au sommet des marches, se dresse sous un grand ciborium en pierre composé de quatre colonnes surmontées chacune d’un ange portant un instrument de la Passion, la voûte intérieure est dorée et percée d’étoiles.
Comme chez nous, l’architecte a pensé et dessiné la décoration de l’église en même temps que l’architecture, des citations de la Bible en latin bordent les plafonds et les vitraux sont non figuratifs. Autre ressemblance, mais pour d’autres raisons, le clocher – en fait un clocher-porche qui servit de tour de guet pendant le siège de Paris en 1870 et qui fut la cible des bombardements au cours des deux guerres mondiales –, monumental et d’inspiration méridionale, se dresse comme un signal aux regards des Parisiens

Sabine Garnier